mardi 22 avril 2008

La diplomatie en action : baisse ton pantalon !

Je ne peux résister à la tentation... je vous copie le point de presse du porte-parole du Quai d'Orsay en date de ce jour, le 22 avril. A propos de la Chine, c'est magnifique. Un jour, j'aurai le talent pour parler de même...

(L'ambassadeur de Chine en France s'est fendu d'une lettre très
menaçante, où il dit que la décision de la ville de Paris de faire du Dalaï
Lama un citoyen d'honneur constituera un précédent très négatif et par
ailleurs ne rendra que pire la situation au Tibet. Avez-vous une réaction ? Par
ailleurs, et d'un point de vue purement technique, est-ce que l'ambassadeur de Chine a présenté ses lettres de créance et est autorisé à parler ?)

Sur ce dernier point je vais me renseigner. S'agissant de votre
première question, la lettre n'a pas été adressée aux autorités françaises,
aux autorités nationales, mais aux élus municipaux. Je ne l'ai pas lue et je n'ai
rien à dire de plus que rappeler les messages que nous avons envoyés depuis
plusieurs jours tant sur la situation au Tibet que sur la situation de
M. Hu Jia. Je vous rappelle en particulier le communiqué du ministre et de
Mme Rama Yade sur la situation de M. Hu Jia. Ce qui est décidé par la mairie
de Paris relève de la mairie de Paris. Nous n'avons pas à interférer avec des
décisions qui sont prises par la ville de Paris.

(Donc la Chine a tort d'en tirer des conséquences alors que cela ne concerne que la ville de Paris ?)

C'est votre interprétation, mais quand la ville de Paris prend
des décisions qui peuvent intéresser la Chine, il est tout à fait normal qu'un
ambassadeur de Chine en France réagisse. Je ne dirais pas qu'il a tort ou
raison. Ce que je vous dis, c'est que cela concerne la mairie de Paris et je
vous rappelle les positions que nous avons prises aussi bien à l'égard de la
situation au Tibet qu'à l'égard de M Hu Jia.

(Comment décririez-vous l'état actuel des relations franco-chinoises ?)

Nous avons des relations très étroites et un partenariat
stratégique global avec la Chine. C'est d'ailleurs dans le cadre de ce
partenariat que le conseiller diplomatique du Président de la République se
rend cette semaine à Pékin.

Pour le reste, nous avons vu ces dernières semaines, c'est vrai,
des manifestations ici et là. La préparation des Jeux olympiques a donné lieu
à certaines manifestations mais il y a de notre part, je le redis, une volonté
d'apaisement et de dialogue, et nous espérons que la situation va très vite
retourner à l'apaisement.

(Qu'est-ce que vous préconisez alors pour un retour à la normale ?)

Comme je vous l'ai dit hier, nous espérons que les choses vont
s'apaiser. Notre ambassadeur s'est exprimé à ce sujet à Pékin. Le ministre a
reçu samedi - j'ai répondu hier à une question sur ce sujet - un émissaire du
président de la République populaire de Chine.

Nos relations existent, elles sont étroites, et nous espérons
que la situation va très vite s'apaiser.

Cette volonté que je ressens du côté français, je la ressens
d'ailleurs également du côté chinois. Je pense que vous aurez noté comme moi
ce qu'une dépêche de l'AFP nous a indiqué ce matin, je cite : "La Chine a
exprimé mardi sa désapprobation face à "certains actes individuels
radicaux" commis lors des manifestations anti-occidentales qui ont eu lieu
ces derniers jours dans tout le pays." La porte-parole du ministère des
Affaires étrangères, Mme Jiang Yu a déclaré, je cite : "Récemment
certains Chinois, dont des étudiants, ont lancé spontanément des actions de
protestation et des appels au boycott de produits français. Nous pensons
qu'ils peuvent exprimer leur patriotisme de manière légale et raisonnable. Nous ne
sommes pas d'accord avec certains actes individuels radicaux qui ont eu lieu
dans des manifestations".

Comme vous le voyez, ces propos comme les miens montrent bien
qu'entre le peuple chinois et le peuple français, qu'entre la République
populaire de Chine et la France, les relations sont vraiment des relations de
franchise et d'amitié.

(Avez-vous constaté une répercussion sur la vente de produits français en Chine ?)

La réponse est non.

(Est-ce que la France, à travers son ambassade, a donné des
consignes particulières aux entreprises implantées ou ayant investi en Chine
en vue des manifestations ? Deuxièmement, est-ce que la France a protesté contre
un certain nombre de manifestations comme les croix gammées sur les drapeaux français et la remise en question de la moralité de Jeanne d'Arc ?)

Sur la première question, il n'y a pas de consignes mais il y a
des contacts permanents entre notre ambassade et nos hommes d'affaires, nos
entreprises qui sont extrêmement actives et présentes - vous avez d'ailleurs
pu le constater ces derniers jours dans la presse. Et il n'y a pas aujourd'hui à
notre connaissance d'impact sur les ventes et les échanges économiques et
commerciaux.

Sur votre deuxième question, je vous renvoie à ce que j'ai dit
hier en réponse à une question qui concernait les manifestations : nous
appelons à l'apaisement et au dialogue et nous regrettons vivement tous les
gestes - cela ressemble tout à fait à ce qu'a dit la porte-parole du ministère
chinois des Affaires étrangères, mon homologue chinoise - qui ne vont pas dans
le sens de l'apaisement et du dialogue.

(Vous avez dit que les relations entre la ville de Paris et l'ambassadeur de la République populaire de Chine étaient leur problème.)

Je n'ai pas dit que c'était leur problème. J'ai dit que cela
faisait partie d'une relation de l'ambassadeur de Chine avec la ville de
Paris.
L'ambassadeur a écrit à la municipalité de Paris, pas aux autorités nationales
françaises.

(Vous suggérez que la ville de Paris est un pays à part.
Toutefois, cela retombe sur vous, vous devez gérer cette situation. Est-ce que
vous gérez cette situation ou bien est-ce que Paris est vraiment un pays à
part ?)

Non. Paris n'est pas un pays à part, mais les collectivités
locales sont tout à fait indépendantes et donc ce que font les communes, les
municipalités, est de leur responsabilité. Cela fait partie de la relation
entre l'Etat français et les collectivités locales, ce n'est pas de mon
ressort en tant que porte-parole du ministère des Affaires étrangères et européennes.
Nous n'avons pas à interférer avec des décisions qui sont prises par la ville
de Paris.

(Mais, même si vous n'avez pas à interférer, cela vous concerne car c'est nocif pour les relations avec la République populaire de Chine.)

Je comprends ce que vous voulez dire mais nous avons fait savoir
à notre niveau les messages que nous souhaitions adresser à la Chine.

(Dans sa lettre, l'ambassadeur dit qu'il y aura un impact, des
conséquences sur les relations franco-chinoises et que cela va endommager la confiance entre la République populaire de Chine et la France.)

C'est ce que dit l'ambassadeur. Je n'ai pas vu cette lettre qui
ne nous est pas adressée. Je vous renvoie simplement à ce que nous sommes en
train de faire et de dire aux autorités chinoises avec qui nous sommes en
contact permanent : comme je vous l'ai dit, le ministre a reçu l'émissaire du
président de la République populaire de Chine et je vous rappelle également
qu'il a eu au téléphone son homologue la semaine dernière. Nous appelons à
l'apaisement et au dialogue. Les propos tenus par la porte-parole du ministère
chinois des Affaires étrangères montrent que nous sommes tout à fait sur la
même ligne.


C'est beau la diplomatie. D'autres pourraient dire que ça s'appelle baisser son pantalon et attendre la surprise...

Vous pourrez voir le communiqué de presse (ici) suivant la rencontre le président Sarkozy et le directeur général de l'ONU (dtc) pour l'agriculture et l'alimentation. Ce que j'en retiens, c'est que "l'agriculture doit redevenir un secteur clé du développement". C'est beau l'ironie... Avoir du talent, c'est savoir rejeter ses fautes sur ses adversaires. C'est aussi une autre définition pour diplomatie internationale.

Un autre extrait d'un discours prononcé par le président de la République française lors de la troisième rencontre des économie majeure à propos de l'énergie et du climat :

Ce n'est pas pour demain, ce n'est pas pour après-demain, c'est pour maintenant. Et cette urgence doit nous conduire à sortir de positions défensives, aussi légitimes qu'elles puissent être. Moi, je comprends bien que chaque pays veuille défendre ses intérêts. Si vous, représentants des gouvernements, vous ne défendez pas les intérêts de votre pays, personne ne le fera à votre place. Mais si, chacun d'entre nous, on est sur des positions défensives qui consistent à incarner uniquement les petits intérêts de notre pays, aussi légitimes soient-ils, cela conduit à quoi, à l'arrivée ? A la catastrophe.


"A la catastrophe". C'est bien comme formulation, c'est punché, c'est alarmiste... ça fait genre "je m'inquiète beaucoup, j'ai conscience du problème...". La vérité, c'est que c'est un discours et rien d'autre. Du blabla, du vent. Le passage sur le détroit de Gibraltar est à mon avis plus brut, plus Sarkozyste. En gros : aidons ces pauvres affamés africains avant qu'ils se mettent dans la tête de venir massivement dans nos beaux jardins fleuris.

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